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L’AMCCA, le syndicat des PNC réagit à l’impair commis sur le mur du parlementaire
Azaghie Vythelingum, une hôtesse d’Air Mauritius, a interpellé le député de l’Opposition Shakeel Mohamed après que ce dernier ait fait une intervention en direct sur Facebook dimanche pour évoquer la question de l’auto-isolement du personnel navigant et les risques que cela engendre au plan de la santé publique. « Ma profession n’a pas besoin de porte parole », estime ce membre du personnel navigant de MK. Le député Mohamed s’est gardé de polémiquer avec sa contradictrice, mais la Air Mauritius Cabin Crew Association (AMCCA), le syndicat du personnel navigant cabine (PNC) a fini par émettre un communiqué précisant que cette instance syndicale « reconnaît le droit de tous les élus de l’Assemblée nationale d’interroger les pouvoirs publics et le Gouvernement, comme bon leur semble et dans les paramètres de la loi ».
« Nous considérons qu’il est malvenu de suggérer à un député de s’en abstenir parce qu’il ne connaîtrait pas les technicités de notre profession », a fini par réagir l’AMCCA ce matin, après « plusieurs appels de nos membres » suite aux propos désobligeants de leur collègue envers un élu de l’Assemblée nationale. C’est que Azaghie Vythelingum n’y est pas allé de main morte dans ses propos envers l’élu de la république. « Je demanderai (sic) à tous les pseudos spécialistes de l’aviation qui saluent votre vidéo et vous même de vaquer à vos occupations primaires et les vaches seront bien gardées », a lâché cette hôtesse dans sa réplique sur le mur du député.
La maladresse est aussi choquante qu’elle peut être préjudiciable à son auteure, car dès la signature de leur contrat d’embauche, le personnel d’Air Mauritius, comme la plupart des employés du secteur privé d’ailleurs, consent à des devoirs de réserve vis-à-vis de leur employeur. Comme le fait d’ailleurs remarquer l ‘AMCCA, « un employé s’engage contractuellement à ne pas donner des informations concernant la compagnie sans le consentement préalable de la direction ». Or, en intervenant sur le mur du député et, de manière intempestive de surcroît, on pourrait considérer que Azaghie Vythelingum aura aggravé son affaire. A moins que l’affaire, justement, n’aurait été téléguidée… Ce dont on devrait être renseigné en fonction d’une sanction éventuelle ou… de l’impunité pour cette témérité !
Selon le communiqué de ce matin, « L’AMCCA, tout en demeurant sensible à l’opinion de tout un chacun, tient à préciser que notre collègue s’exprimait en son nom personnel mais que cela ne représente pas l’unanimité des opinions des membres de notre association ». Les membres de l’exécutif d’AMCCA expliquent comment eux-mêmes exercent leur droit à la parole dans le cadre de leur mandat électif pour représenter les intérêts de leurs membres auprès des diverses instances de l’Etat. « Contrairement à notre collègue qui a un problème de légitimité pour les propos qu’elle tient en public, les membres de l’exécutif de notre association sont habilités à s’exprimer et à faire les représentations au nom de notre profession et dans le meilleur intérêt de nos membres. Nous assumons avec responsabilité cette prérogative qui nous est attribuée par le vote de l’assemblée générale », expliquent les responsables de l’AMCCA.
Le protocole revu grâce aux remontées d’information
Le syndicat explique avoir fait part, depuis plusieurs mois, aux autorités sanitaires ainsi qu’à la direction de MK, des risques auxquels leurs membres et leurs familles sont exposés faute de procédures plus adéquates. « C’est grâce à ces remontées d’information que le protocole a été revu et amendé plusieurs fois dans le passé et cela dans l’intérêt de tous, (Air Mauritius, les employés et le pays) », fait ressortir l’AMCCA qui dit espérer « d’autres amendements dans le futur afin de combler les lacunes existantes ».
« Nous espérons que l’honorable Mohamed saura dépasser cette réaction malheureuse de notre collègue et qu’il ne soit pas offensé par cette expression péremptoire », écrit l’exécutif du syndicat qui dit se réjouir qu’un membre de l’Assemblée nationale (de surcroît un ex-ministre du Travail) s’intéresse enfin à leur situation. « Nous encourageons les autres, qu’ils soient du gouvernement ou de l’opposition, à le suivre dans cette voie et de s’engager concrètement pour une totale transparence. C’est comme cela qu’on fonctionne dans une démocratie ».
Si le député rouge ne s’est pas engagé dans la polémique avec Mme. Vythelingum, il a, par contre, partagé dans un post subséquent l’enquête d’Indocile faisant état du fait que les familles de 160 PNC ont été exposées aux risques de contamination durant plusieurs mois. Cette enquête, publiée il y a quatre mois déjà, abondait de détails sur la manière dont 110 membres d’équipage ont changé leurs déclarations d’incapacité à l’auto-isolement après que les administrateurs aient opté de les mettre en congé sans solde. L’article évoque aussi les pouvoirs ministériels accrus rendant les ministres Jagutpal et Callychurn quasi omnipotents alors qu’ils se révélaient impotents face à ces mesures coercitives.
Les familles de 160 PNC exposées aux risques de contamination
L’enquête se concluait en ces termes : « Il y a l’évidence que, malgré la coercition dont ils font l’objet, 160 PNC ont avoué être incapables de satisfaire aux protocoles du ministère de la Santé pour l’auto-isolement à domicile. Il y a l’évidence que durant tous ces mois, ces 160 familles ont été continuellement exposés aux risques de contamination. Et face à ces évidences, il n’y a plus qu’une question à poser : le ministre de la Santé, Kailesh Jagutpal, et son collègue du Travail, Soodesh Callichurn ont-ils opté pour l’abdication face à Alain Leung Hing Wah, le directeur des opérations de vol d’Air Mauritius, et les administrateurs de la compagnie aérienne, Sattar Abdoula et Arvindsingh Gokool ? »
Que notre enquête remonte aujourd’hui et
apparaisse comme une nouveauté pour de nombreux internautes n’est pas
surprenant. Cela est principalement dû au fait que les journalistes de la
presse locale se gardent de citer leurs confrères et de faire mention des
nouvelles qu’ils pourraient sortir en primeur. La pratique de la vedettisation
de quelques journalistes a relégué l’information au deuxième plan et ce travers[2]
est désormais une norme répandue à Maurice.
[1] Pour Kailesh Jagutpal, le ministre de la Santé, il faut se fier à la MBC et au GIS comme seules sources d’informations véridiques sur l’évolution de la situation de Maurice face à la pandémie du Covid-19.
[2] C’est contraire au code d’éthique et à la déontologie des journalistes partout dans le monde.