Les Chagos : la Grande Bretagne prête pour des négaociations avec Maurice

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Joël Toussaint évoque les aspects génocidaires de cette problématique

L’aéroport militaire de Diégo Garcia. Comme pour Agaléga avec l’occupation des forces indiennes, il s’agissait initialement d’une station-relais radio.

Le Royaume-Uni va entamer des négociations avec Maurice sur l’avenir des îles Chagos, un territoire britannique de l’océan Indien depuis 1814. James Cleverly, le ministre britannique des Affaires étrangères, a déclaré qu’il voulait « résoudre toutes les questions en suspens » sur l’archipel. Mais, Jean-Claude de L’Estrac ainsi que Joël Toussaint n’ont eu de cesse de se pronocer sur ces « questions en suspens ». Et Joël Toussaint, notre rédacteur-en-chef, pointe même vers des crimes génocidaires impliquant le sort des Rodriguais et des Agaléens.

Dans une déclaration ministérielle écrite, M. Cleverly a annoncé: « Le Royaume-Uni et Maurice ont convenu de s’engager dans des négociations constructives, en vue de parvenir à un accord d’ici le début de l’année prochaine ». La déclaration précise que « compte tenu des procédures judiciaires pertinentes, nous avons l’intention de parvenir à un accord sur la base du droit international pour résoudre toutes les questions en suspens, y compris celles relatives aux anciens habitants de l’archipel des Chagos ».

Le ministre des Affaires étrangères a confirmé que les négociations incluraient « l’exercice de la souveraineté ». Le fonctionnement efficace de la base militaire conjointe américano-britannique sur Diego Garcia serait garanti, a-t-il ajouté. Cette décision fait suite à des entretiens entre Liz Truss, pendant son court mandat de Premier ministre, et le dirigeant mauricien Pravind Jugnauth lors de l’Assemblée générale des Nations Unies à New York en septembre.

Après la création, en 1966, de la base militaire à Diego Garcia, la plus grande des 63 petites îles de l’archipel des Chagos, les habitants de cette île ont été expulsés. Les Chagossiens ont fait campagne pour rentrer depuis que qu’environ 1 800 personnes ont été forcées de quitter toutes les îles de l’archipel entre 1960 et 1970.

Une conspiration assortie d’un génocide

Maurice, qui a obtenu son indépendance du Royaume-Uni en 1968, maintient que les îles lui appartiennent et que les Chagossiens se sont battus pour leur retour devant les tribunaux britanniques. La plus haute juridiction des Nations Unies, la Cour internationale de justice de La Haye, a statué que l’administration du territoire par le Royaume-Uni, par le biais du BIOT, était « illégale » et devait cesser. Mais jusqu’à présent, le Royaume-Uni a résisté à la pression internationale pour entamer des pourparlers sur ces îles.

Interrogé au sujet de cette déclaration, notre rédacteur-en-chef Joël Toussaint, le journaliste qui avait initié la campagne médiatique sur la question des Chagos dans les colonnes du quotidien Le Mauricien durant les années 90, affirme que cette issue n’est aucunement surprenante. « Depuis 2011 j’affirme que la cession de Diego Garcia à la Grande Bretagne fait partie d’une conspiration avec les dirigeants Mauriciens qui ont participé à la conférence constitutionnelle de Lancaster House. La cession de Digeo Garcia aux Anglais et l’annexion de Rodrigues et d’Agaléga à Maurice font partie de ce même processus. Ce n’est donc pas étonnant que les conspirateurs finissent par s’entendre », dit-il.

Cette issue, selon Joël Toussaint, vient rendre justice à Me. Hervé Lassémillante qui avait privilégié la négociation avec la Grande Bretagne. « Hervé Lassémillante s’était rendu compte que le dossier du gouvernement mauricien était bien chancellant en raison de la participation de ses dirigeants à cette conspiration et il considérait qu’il fallait privilégier la négociation pour un aboutissement favorable au peuple chagossien. Fernand Mandarin, qu’il représentait, comprenait les tenants et les aboutissants. Mais Bérenger, et ensuite Anerood Jugnauth, ont opté pour Bancoult, un élément plus maléable pour les intérêts mauriciens », explique-t-il. Toussaint travaille actuellement sur la rédaction d’un ouvrage qui montre les implications des dirigeants Mauriciens dans ce qu’il qualifie de « conspiration ». Pour lui, les dirigeants Mauriciens qui ont négocié l’indépendance de Maurice sont « tous des mécréants, des individus qui ont abdiqué du sens de l’honneur, pour accéder au pouvoir, au détriment de peuples autochtones que seuls quelques députés Anglais plus scrupuleux ont vainement essayé de protéger ».

La suite on la connait : les combats de Bancoult devant les tribunaux britaniques lui ont accordé la légitimité pour réclamer le droit au retour du peuple chagossien. Mais, on se souviendra que Jean-Claude de L’Estrac qui a aussi documenté la question chagossienne, concluait 1 sur la question chagossienne avec le fait que, le 26 janvier 2011 à Londres, Allen Vincatassin avait prêté serment « en tant que premier présidet du premier gouvernement en exil des Chagos Islands, devant le maire de Crawley […] où vivent un millier de Chagossiens qui ont choisi d’exercer leur droit de résidence au Royaume-Uni ». Et l’auteur d’ajouter que « Sur son site personnel, le président Vincatassin explique avoir pris cette initiative pour que les Chagos reviennent aux Chagossiens, et « non à Maurice… ».

Aussi, ajoute Joël Toussaint : « L’occasion fait le larron et les dirigeants mauriciens, qu’il s’agisse du gouvernement et de l’opposition, se sont réjouis de l’issue de la réclamation devant le tribunal de La Haye ont et croient profiter de l’aubaine au plan partisan ». Mais, dit-il, il reste toutefois un élément fondamental : « Dans le cas des Chagos, la communauté internationale est disposée à conclure à un crime contre l’humanité. Ce qui est déjà très grave. Mais dans le cas de Rodrigues et d’Agaléga, il existe de nombreux éléments favorisant le « prima facie »  pour les crimes de génocide tels que définis pour le Tribunal de Nuremberg. Et nous avons des dirigeants Mauriciens qui sont encore bien vivants et qui sont susceptibles d’en répondre devant le Tribunal Pénal International ».


1  « L’an prochain à Diego Garcia… », Jean-Claude de L’Estrac, mai 2011, Editions Le Printemps


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