Le parallèle zimbabwéen

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Temps de lecture : 4 minutes
Richard Rault

Notre pays connaît une lente descente aux enfers, comparable à celle qu’aura connu le Zimbabwe a compter du début des années 2000. 

Il y a chez nous, comme jadis au Zimbabwe, une institutionnalisation du clientélisme politique à travers l’appui sur des groupes et sous-groupes ethniques dont les membres sont récompensés à coup de faveurs, contrats et promotions. 

Cela s’accompagne d’un noyautage de nos institutions et leur paralysie à degrés variables selon qu’il faille diriger les investigations, actions administratives contre les protégés ou adversaires du régime. Nous sommes arrivés à ce stade. 

Au Zimbabwe, on a ensuite assisté à des manipulations électorales et à des fraudes massives. Lorsque les citoyens ont manifesté, la répression a suivi et on a vu alors l’arrestation des opposants, cependant que l’économie du pays s’enfonça dans un gouffre inflationniste. Le Zimbabwe, alors grenier du sous continent, devint un net importateur de viandes et de céréales. Il n’en est pas sorti depuis. 

Le régime, bien entendu maître des médias officiels, s’attaqua parallèlement à la presse libre et finit par la réduire au silence. La langue de bois devint le seul discours autorisé au Zimbabwe.

Bien entendu, nombre de citoyens, souvent les plus doués n’attendrirent pas et émigrèrent. Cette fuite des cerveaux accentua la baisse de productivité et de l’image du pays en général. Lorsque les médias internationaux s’intéressèrent à la situation et à la détérioration des droits humains, ils en furent bannis. S’appuyant sur l’Afrique du Sud et ses anciens contacts en Afrique, Mugabe fit taire les critiques internationales comme des tentatives de néocolonialisme. 

Le régime, bien entendu maître des médias officiels, s’attaqua parallèlement à la presse libre et finit par la réduire au silence. La langue de bois devint le seul discours autorisé au Zimbabwe.
Pour satisfaire les envies de ses partisans, le régime procéda aussi au dépeçage du secteur privé en confisquant et spoliant des biens de compagnies et des terres de fermiers, souvent blancs, mais surtout de tous ceux qu’il considéra comme ses adversaires politiques.

On connaît la suite, avec la répression successive, le maintien de Mugabe par des élections truquées et enfin un coup d’état militaire. La démocratie zimbabwéenne a vécu et ne renaîtra pas de sitôt. Les mauvaises habitudes des décennies précédentes vont perdurer. 

Nous assistons déjà à une fuite de nos cerveaux avec de plus en plus de jeunes qui découragés, ne rentrent pas après leurs études, quand ce ne sont pas leurs parents qui les incitent à rester ailleurs.
Nous voyons déjà la constitution d’une bourgeoisie d’Etat tributaire de contrats et de marchés publics, des enquêtes partiales, l’inertie de certaines institutions, une langue de bois tenue ridiculement face aux médias internationaux. 

La lamentable performance de Joe Lesjongard, porte-parole du gouvernement sur les ondes de TV 5, n’a rien à envier à la piètre performance de PKJ, sur celles de la BBC, après le naufrage du Wakashio. On s’interroge encore sur la brutale interruption de communication en pleine interview du PM. 

La multiplication des scandales politico-financiers ne va pas cesser. Tout au contraire! Car notre gouvernement aura besoin de s’appuyer encore plus sur un pré carré de fidèles et il devra davantage donc truquer les règles. Comme cela fut déjà le cas avec les commandes post-confinement. 

La tâche de Soodesh Callichurn, pour réformer la STC, s’avérera excessivement difficile et risque bien d’échouer. D’ailleurs comment y réussir sans non seulement nettoyer ces écuries d’Augias et donc sérieusement déplaire à des nous-banne, mais consolider les règles du Public Procurement Act, en empêchant le recours systématique aux emergency procedures, sinon en créant un organisme indépendant (encore un, sera-t-on tenté de dire) pour en superviser ledit recours? 

Il faut bien indiquer à ceux qui doutent qu’une telle déchéance puisse nous arriver, que ces mêmes doutes ont accompagné la chute du Zimbabwe. 

Plus d’une personne de bonne volonté s’y cassera les dents. On ne voit guère du reste se précipiter de telles personnes, malgré l’appel du PM, depuis la tribune que lui accordait l’Arya Samaj, à Tyack pour commenter la manifestation du 13 février. 

Et c’est d’ailleurs systématiquement via les sociétés socioculturelles que le PM axe ses réponses, évitant ainsi les gênantes questions de la presse, dont on exclut les éléments les plus inquisiteurs, aux conférences de presse, tenues sous bonne garde mais au discours bien ciblé pour une tranche de la population, bien relayé par la MBC et des médias sous contrôle.

Il faut bien indiquer à ceux qui doutent qu’une telle déchéance puisse nous arriver, que ces mêmes doutes ont accompagné la chute du Zimbabwe. 

Évidemment, on peut espérer que notre culture démocratique soit plus forte pour surmonter nos obstacles. Mais à voir la sclérose de nos Oppositions, comme de ses divisions, il y a à craindre que le régime ne puisse profiter de celles-ci pour demeurer envers et contre tout. Et maintenir la spirale actuelle de corruption avec son cortège infect de népotisme et de copinage institutionnalisés. 

Quand donc comprendra NCR qu’il faut qu’il parte pour que nous puissions à nouveau disposer de véritables options? Idem pour tous les autres dinosaures de l’Opposition du reste.


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