Courses Hippiques – Rapport Intérimaire Parry : SAJ et Pravind Jugnauth avaient-t-ils induit le parlement en erreur ?

Vous avez aimé cet article, vous pouvez le partager. Merci d'en faire profiter à d'autres.

Temps de lecture : 4 minutes

Navin Ramgoolam : « L’ancien président, Kailash Purryag, avait fait remettre une copie du rapport intérimaire à Anerood Jugnauth »

L’ancien PM révèle que Gilbert Merven l’avait dissuadé d’instituer cette commission d’enquête

Kailash Purryag avait institué en septembre 2014 la commission d’enquête sur les courses hippiques demandée par Navin Ramgoolam.

L’ancien Premier ministre est formel : Kailash Purryag avait fait remettre à Aneerood Jugnauth une copie du rapport intérimaire de la commission d’enquête sur les courses hippiques à Maurice. Ce qui vient contredire la déclaration à l’Assemblée de sir Anerood Jugnauth (SAJ) qui, à l’époque, affirmait n’avoir rien reçu. SAJ avait-il induit le parlement en erreur ? Navin Ramgoolam estime que les faits devraient permettre à nos lecteurs d’en juger. Les faits montrent deux intrigants dans l’affaire: Gilbert Merven, pointé du doigt dans le rapport, aurait tenté de faire avorter l’institution de la commission d’enquête selon Ramgoolam, et à l’autre extrémité, Dev Beekharry avait réceptionné une copie du rapport que les Jugnauth ne pouvaient retracer…

« Le président, Kailash Purryag m’avait remis une copie du rapport intérimaire, mais je n’ai pu y donner suite puisque, comme vous le savez, j’ai perdu les élections peu après » raconte Navin Ramgoolam. « Par contre, j’ai demandé au président de remettre une copie de ce rapport au nouveau Premier ministre et il m’a assuré qu’il allait le faire », poursuit-il. C’est ce qui lui valut la surprise quand SAJ affirmait qu’il n’avait pas obtenu ledit document.

« J’étais très surpris et j’ai posé la question à Purryag qui m’a confirmé avoir envoyé une copie du rapport au nouveau Premier ministre », relate-t-il. Intrigué, Navin Ramgoolam lui demande s’il lui a remis le document en main propre. Son interlocuteur lui apprendra qu’il avait fait mieux que cela : le document a été transmis à SAJ par despatch officiel. Navin Ramgoolam confie qu’il voyait ainsi s’éloigner la perspective d’un assainissement du système des paris liés aux courses…  

Un Premier ministre ne décide pas d’une commission d’enquête sur un coup de tête. Il faut qu’il y ait eu des éléments suffisamment graves qui ont été portés à sa connaissance pour qu’il s’engage dans cette voie. Car une commission d’enquête aboutit toujours à un rapport qui, d’une part, met en lumière les dysfonctionnements d’un système et, d’autre part, met en cause ceux qui en seraient les responsables et les bénéficiaires.

Dans le cadre de notre enquête sur le conflit larvé entre certains éléments de la Gambling Regulatory Authority (GRA) et la direction du Mauritius Turf Club (MTC), nous avons cherché à comprendre ce qui a pu motiver l’ancien Premier ministre à instituer une commission d’enquête sur les courses à Maurice. Loin de se défiler, Navin Ramgoolam nous a appelé et a pris l’option de tout déballer.

« C’était un dimanche et j’avais lu une interview de Jean-Michel Giraud et, vu la teneur, je me doutais que Paul Bérenger allait poser des questions le mardi suivant. J’ai donc demandé à rencontrer le président du MTC que je ne connaissais pas. Je lui ai donné rendez-vous à mon bureau dès lundi et il est venu. Quand je l’ai écouté, j’ai été très choqué. Je lui ai dit que c’est un scandale et que j’allais nommer une commission d’enquête. Il m’a dit que c’est la chose à faire, mais il m’a aussi prévenu que certains de mes amis n’allaient pas aimer », raconte Navin Ramgoolam.

Effectivement, Paul Bérenger, alors Leader de l’Opposition, est venu à la charge le mardi suivant au parlement. Et le Premier ministre, qui avait mûri sa décision entretemps, va ainsi lui annoncer qu’il entend instituer une commission d’enquête. Dans les sièges d’en face, certains députés se disent qu’il s’agit d’un coup de bluff. Mais pas sur ce coup-ci.

Ramgoolam nous explique qu’il a presqu’aussitôt commencé à consulter des accointances en Angleterre et c’est ainsi qu’il sera orienté vers le trio Richard Parry, Dennis Gunn et Paul Scotney. « Ils ont hésité d’abord. Il a fallu que j’insiste pour les convaincre », dit-il. Mais une fois entamées, les choses vont aller assez rapidement puisque la commission d’enquête était instituée le 24 septembre 2014 par Kailash Purryag et les commissaires allaient lui rendre le rapport intérimaire en mars 2015.

L’ancien Premier ministre considère que Giraud avait vu juste sur la question des activités mafieuses autour des courses hippiques à Maurice. Et aussi sur le fait que certains de ses amis n’allaient pas apprécier la démarche. Il nous avoue qu’il a été dissuadé d’aller de l’avant avec l’institution de cette commission d’enquête.

Navin Ramgoolam révèle que Gilbert Merven l’a dissuadé de faire instituer une commission d’enquête. Xavier-Luc Duval avait lui révélé qu’une copie du rapport intérimaire mystérieusement disparu avait été remise deux ans plus tôt à Dev Beekharry.

« Gilbert Merven était un ami personnel et quand il a appris que j’avais rencontré Giraud, il m’a dit de n’en rien faire. Puis quand j’ai informé le parlement de mon intention de faire instituer une commission d’enquête, il m’a appelé, me disant : « Est-ce que je peux venir te voir ? ». Je lui ai dit que j’étais déterminé à avoir cette commission d’enquête et je me souviens lui avoir dit : « Si ce n’est pas vrai, tu n’as rien à craindre ». Voilà, et ensuite j’ai pris les rendez-vous pour mon prochain passage à Londres », relate l’ancien Premier ministre. La suite est connue : Gilbert Merven fait partie des personnes mises en cause dans le rapport de la commission d’enquête.

Les faits devraient permettre à nos lecteurs de se faire une idée si SAJ avait induit le parlement en erreur, avançait Ramgoolam. Or, des faits connus à ce jour, il y a la soumission, le 13 juin 2017, d’une copie authentifiée du rapport intérimaire à l’Assemblée par Xavier-Luc Duval. Ce coup de théâtre survenait à l’Assemblée après que le fils Jugnauth, succédant à son père au poste de Premier ministre, eut affirmé que le rapport était « untraceable » !

Ainsi, deux ans après la disparition mystérieuse dudit rapport intérimaire, voilà que non seulement Duval, alors Leader de l’Opposition, le produisait mais, il affirmait, en outre qu’une copie avait été remise en mars 2015… à Dev Beekharry !


Vous avez aimé cet article, vous pouvez le partager. Merci d'en faire profiter à d'autres.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée.