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Alors que la guerre en Ukraine a emporté le cours de nombreuses matières premières, le marché mondial du sucre présente une stabilité non-négligeable. L’Europe va devoir payer davantage pour importer et les besoins des marchés européens pourraient faire grimper les prix pour le sucre raffiné. Car les raffineries européennes, craignant de manquer de gaz, cherchent à sécuriser leur approvisionnement et cela engage des coûts supplémentaires.
Le sucre importé et raffiné va coûter plus cher aux acheteurs industriels européens. En mai dernier, ils déboursaient 450 euros pour une tonne et aujourd’hui ils obtiennent le sucre au prix de 750 euros la tonne. La stabilité des prix semble de mise mais, par rapport à l’année dernière, cela fait bien 300 euros de plus. En outre, une des conséquences de la guerre en Ukraine : les prix européens s’envolent sur le marché spot, c’est-à-dire celui du marché pour des livraisons immédiates.
Les Européens vont devoir importer plus de sucre durant cet hiver qui est à leur porte. Les analystes des marchés du sucre s’attendent à une diminution des surfaces sous culture de betteraves, une agriculture très gourmande en intrants. Or, autre conséquence de la crise militaire en Ukraine : le prix des engrais a considérablement augmenté. Ainsi, les agriculteurs européens devraient se tourner vers des cultures moins exigeantes en engrais. La perspective de cette transition, qui signifie une baisse de production en Europe, alimente ainsi la hausse des prix du sucre pour les industriels européens.
C’est de l’autre côté de la planète, grâce au Brésil notamment, que les cours du sucre ont connu une légère baisse et demeurent stables sur le marché mondial. Certes, l’Inde est désormais le premier producteur de sucre, mais la Grande Péninsule exporte peu et produit essentiellement pour sa consommation locale. En outre, le programme Éthanol indien est en pleine croissance et cela réduit d’autant les volumes de sucre indien à l’export. Ainsi, le Brésil demeure le plus gros exportateur mondial et reste l’acteur stabilisateur du marché.
Les surfaces de canne ont pourtant diminué dans ce pays mais, un peu comme pour Maurice, la perte en superficie sous culture de canne a été compensée en volume de sucre. L’explication pourrait aussi venir d’un autre facteur : le prix du pétrole… Souvenons-nous que le 10 août dernier, Indocile annonçait, en primeur à Maurice, que le Brent passait en dessous des 100 dollars. Au Brésil, face au cours du brut à la baisse et à l’inflation à la hausse, le géant Petrobras a baissé le prix de l’essence. Celui de l’éthanol a subi la tendance baissière automatiquement. Par conséquent, les transformateurs Brésiliens de canne, gagnant moins aujourd’hui en allouant leurs champs de canne à sucre à la fabrication de biocarburant, ont tout simplement limité le débouché éthanol pour privilégier la production de sucre. C’est ce qui a favorisé le maintien durant ces derniers mois d’un niveau suffisant d’offre de sucre à l’export pour répondre à la demande mondiale.
Certes, les groupes de presse locaux amplifient les nouvelles au sujet de la tension sur le marché européen pris à défaut par les effets-boomerang de leurs sanctions contre la Russie. Néanmoins, il nous reste encore à voir concrètement comment la bonne tenue du marché mondial, actuellement alimenté par une reprise ces derniers mois de la consommation européenne, va profiter au sucre mauricien et à l’économie locale. Ce qui est certain c’est que les analystes du gouvernement et ceux du secteur privé vont devoir se rendre compte qu’ils ne peuvent plus s’abriter derrière les groupes de presse qui leur sont habituellement complaisants. Chez Indocile, nous n’attendons pas les communiqués pour tout exposer au regard public.