Temps de lecture : 3 minutes
Le variant sud-africain du Covid-19 explose à Mayotte et inquiète à La Réunion. La circulation maritime entre Mohéli et les deux autres îles des Comores a été interdite le 28 décembre. Il a fallu ensuite interdire des liaisons aériennes effectuées en temps normal par de très petits petits appareils. Mais c’était trop tard. Le premier décès est survenu le 29 décembre. Le 3 janvier, c’est le maire de Fomboni, la capitale de Mohéli, qui décède à son tour, tandis qu’une douzaine de médecins, démunis, sont contaminés. Des évacuations sanitaires se poursuivent vers La Réunion, où des premiers cas du variant ont été dépistés.
« Il n’y a ni eau ni gel hydro alcoolique, la nourriture manque, les chambres comptent jusqu’à six lits superposés, certains sans matelas », confiait l’un des à Mayotte 1ère, la station télé et radio de ce département français situé à 70 kilomètres des Comores. Mohéli, d’une superficie de 290 km2, est la plus petite des trois îles des Comores. C’est l’île de l’océan Indien devenue célèbre dans les reportages animaliers car c’est l’île où viennent pondre des milliers de tortues. Mais c’est aussi un territoire d’environ 50 000 habitants vivant dans des conditions très difficiles…
L’épidémie s’était pourtant éteinte à Mayotte. Le patient zéro serait un homme de retour d’Afrique du Sud. Il est porteur du 501Y.V2, ce qu’on désigne plus communément comme la variante sud-africaine du coronavirus. Le 17 décembre, il contamine son épouse, puis la belle-mère, qui tient une petite école coranique. Et la contamination a flambé jusqu’à mettre Mayotte sous couvre-feu.
Le 15 janvier, un voyageur arrivant des Comores à Mayotte est dépisté positif au variant ; la préfecture suspend aussitôt les liaisons aériennes et maritimes pour deux semaines. Deux jours plus tard, on enregistre trois nouveaux cas. Mayotte est depuis placée sous couvre-feu de 18 heures à 4 heures du matin.
Cette deuxième vague a déjà fait environ 70 morts dans le pays en l’espace d’un mois. Selon les chiffres officiels, il y en eut 7 en un an lors de la première vague. A Mohéli, les mariages sont désormais interdits, les écoles ainsi que les mosquées sont fermées aussi.
« La situation est sans doute plus sérieuse que celle que nous avons surmontée au printemps 2020 », déclarait le préfet Jean-François Colombet au journal Libération. Il a indiqué qu’il y aura, une nouvelle fois, « le renforcement des moyens de l’Etat pour la protection des frontières maritimes ».
L’une des sources du problème est, en effet, les « kwassas-kwassas», ces barques motorisées qui transportent clandestinement jusqu’aux plages mahoraises, des Comoriens qui tentent de s’installer sur le territoire français, que ce soit à La Réunion ou dans la métropole française.
Plus de 50 cas de variants sud-africains sont détectés, avec un record de 40% de présence lors de derniers prélèvements. Jeudi, le département d’outre-mer enregistrait 798 nouveaux cas, soit un taux d’incidence de 285,5 pour 100 000 habitants et un taux de positivité aux tests de 14%. « Un des plus élevés de France », selon Dominique Voynet, la directrice de l’agence régionale de Santé. La situation sanitaire se dégrade si vite que le préfet place les communes de Bouéni, Dzaoudzi-Labattoir et Pamandzi en strict confinement.
Les pouvoirs publics à La Réunion redoutent que le variant sud-africain se répande chez eux aussi. Pour prendre un vol entre les deux départements d’outre-mer, il faut pouvoir justifier d’un motif impérieux et un test PCR négatif est exigé avant d’embarquer. Enfin, les voyageurs doivent respecter une septaine à leur arrivée dans l’une des deux îles : mais il ne s’agit encore que d’une « obligation morale… ». Ces mesures s’appliquent également sur la liaison Réunion-France dans les deux sens.
Assoumani Azali, le président controversé de l’Union des Comores, a confirmé cette semaine la présence du variant sud-africain et reconnu que son pays est confronté à « une progression exponentielle de la pandémie ».
La solidarité régionale se poursuit toutefois. Jeudi, un avion des FAZSOI[1] a décollé de La Réunion pour acheminer aux Comores 750 kilos de matériel, 12 000 tests antigéniques et 100 000 masques FFP2. Le geste est considérable. Le voisin mauricien, dont le gouvernement se targue d’avoir su gérer la pandémie, ne s’est jusqu’ici pas manifesté au plan de la coopération. Même pas l’envoi d’un expert pour initier les ministres comoriens… à visiter les centres de quarantaine sans masque!
[1] Forces armées de la zone sud de l’océan Indien