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Les anciens procureurs généraux (ministres américains de la Justice) Jeff Sessions et William (Bill) Barr et l’ancien procureur général adjoint Rod Rosenstein ont tous nié, dans le cadre d’une enquête sur des fuites d’informations, avoir eu connaissance des subpoenas[1] – requêtes judiciaires – secrètes en vue de saisir les enregistrements téléphoniques des législateurs démocrates. La semaine dernière, le journal Politico a révélé que pendant la présidence de Donald Trump, le ministère de la Justice a utilisé des ordonnances de la cour pour obtenir des informations d’Apple sur au moins deux membres démocrates de la commission du Renseignement de la Chambre.
Les ordonnances visaient non seulement les législateurs, mais aussi le personnel de leur bureau et les familles, y compris un mineur. Parmi ceux dont les dossiers ont été saisis figuraient le président du Comité du renseignement de la Chambre, Adam Schiff, et le représentant Chris Swalwell de Californie. Tous deux étaient d’éminents critiques de Trump.
L’inspecteur général du ministère de la Justice, Michael Horowitz, a lancé une enquête sur la saisie des dossiers auprès des législateurs, ainsi que des journalistes appartenant aux médias tels que le Washington Post, CNN et le New York Times. Les ordres de la cour comprenaient un volet de bâillon empêchant Apple de divulguer que les données avaient été saisies. Cette ordonnance n’ayant pas été renouvelée cette année, il se pourrait qu’Apple décide d’informer les personnes dont les données auront été saisies.
L’enquête se concentrera sur « l’utilisation par le DOJ[2] des subpoenas et d’autres autorités légales », a déclaré le ministère de la Justice dans un communiqué vendredi. L’une des questions clés est de savoir qui a signé les requêtes judiciaires, que la présidente de la Chambre des représentants Nancy Pelosi a décrites comme une « attaque flagrante contre notre démocratie » par l’administration Trump. Donald Trump a appelé à plusieurs reprises à l’emprisonnement des opposants politiques pendant son mandat.
Ce qui est clair pour Politico qui a travaillé sur le sujet, c’est que l’information a été recherchée par l’administration Trump dans le cadre d’une enquête visant à déterminer qui divulguait aux médias des informations sur le renseignement et les enquêtes sur la collusion présumée de la campagne Trump avec la Russie et d’autres questions de sécurité nationale. Ce qui est clair aussi, c’est que John Demers, un nominé de Trump, dirigeait la Division de la sécurité nationale lorsque les assignations ont été émises. Demers occupe toujours le poste. Pour combien de temps encore ?
Les trois hauts responsables de l’administration Trump au ministère de la Justice ont tous nié avoir eu connaissance des requêtes d’ordonnances de la cour. Le média The Daily Beast a interrogé des sources proches de Sessions, qui occupaient le poste de procureur général lorsque les assignations ont été émises en janvier 2018, qui ont déclaré qu’il n’était pas au courant de la saisie signalée des enregistrements téléphoniques, ni n’a-t-il été informé de cette saisie. À l’époque, Sessions s’était récusé de l’enquête du DoJ[3] sur les liens russes, et il aurait également pu se récuser des enquêtes sur les fuites s’y rapportant.
Bill Barr, qui a été nommé par Trump pour remplacer Sessions environ un an après l’émission des subpoenas, a également nié avoir eu connaissance de la saisie des enregistrements téléphoniques. Barr a déclaré à Politico que lorsqu’il était procureur général, il n’était « pas au courant des dossiers d’un membre du Congrès recherchés dans une affaire de fuite », ajoutant, « Je n’ai jamais discuté des cas de fuite avec Trump. Il ne m’a pas vraiment demandé les détails ». Rod Rosenstein, qui a été adjoint à Sessions et à Barr avant de quitter le ministère de la Justice en 2019, a également déclaré qu’il n’avait aucune connaissance des assignations à comparaître, selon CNN.
Mary McCord, qui dirigeait auparavant la
Division de la sécurité nationale, l’instance qui s’occupe des enquêtes sur les
fuites, a déclaré à Politico qu’une assignation à comparaître visant un élu « serait considérée comme une question
délicate qui nécessiterait une approbation de haut niveau au ministère ». Contactée
pour commenter cette affaire, elle a déclaré : « Tout ce que je peux dire, c’est que toute enquête impliquant un
élu serait considérée comme une question sensible qui nécessiterait une
approbation de haut niveau au ministère ».
[1] Généralement les subpoenas sont des assignations à comparaître. Dans le cas présent, il s’agit de requêtes formulées auprès des tribunaux en vue d’obtenir des ordres de la cour pour mener une action qui est soumise à cette procédure de validation par un juge.
[2] Department of Justice, le ministère américain de la Justice.