Les agriculteurs indiens bloquent Delhi pendant cinq heures

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L’Union Bharatiya Kisan brandit la menace de l’intensification du mouvement

Après 100 jours, la détermination demeure intacte

A la fin du blocus des agriculteurs de l’autoroute à six voies Kundli-Manesar-Palwal (KMP) samedi soir, Rakesh Tikait, le porte-parole de l’Union Bharatiya Kisan, a mis le gouvernement central en garde en évoquant une intensification des mesures populaires si le Centre ne prenait pas en compte leurs demandes d’abrogation des lois controversées sur l’agriculture. Les agriculteurs avaient bloqué certaines parties de l’autoroute à l’occasion des 100 jours de leur manifestation aux frontières de Delhi.

« Aujourd’hui, c’était un blocus de cinq heures[1], mais le KMP qui est un peu comme les frontières de Delhi, peut également être complètement bloqué », a-t-il déclaré. Les agriculteurs du district de Sonipat à Haryana ont contribué au succès de ce blocus en apportant leurs chariots et tracteurs qu’ils ont garés au milieu d’un tronçon de l’autoroute KMP[2], que l’on peut présenter comme la voie-périphérique de la capitale indienne.

« A moins que le Centre ne retire ces trois lois agricoles, notre mouvement contre ces lois se poursuivra. Nous ne reculerons pas », selon les déclarations des manifestants recueillis par Reuters à Sonipat. Des manifestants, y compris des femmes, portant leurs drapeaux syndicaux respectifs ainsi que des drapeaux noirs ont scandé des slogans contre le gouvernement de la majorité BJP pour ne pas avoir accédé à leurs revendications.

Les manifestants ont tenu plusieurs séries de pourparlers[3] avec le gouvernement central sans progrès. « Le gouvernement ne nous a laissé aucune autre option que de protester », déclarait un agriculteur du Pendjab, cité par Reuters. Samyukta Kisan Morcha, un front commun de 32 syndicats d’agriculteurs qui ont été les fers de lance des manifestations, avait appelé à un blocus de cinq heures ce samedi. Les agriculteurs, opposés à la législation agricole du Centre, ont ainsi bloqué samedi l’autoroute périphérique ouest pour marquer les 100 jours du mouvement.

L’autoroute KMP a été construite pour décongestionner les routes toujours très fréquentées de Delhi, notamment en réduisant le nombre de camions entrant dans la capitale nationale, contribuant ainsi à réduire la pollution. Il assure une liaison à grande vitesse entre les districts nord et sud de l’Haryana et donne une liaison ininterrompue à grande vitesse pour le trafic, en particulier le trafic commercial, de l’Haryana aux États voisins.

Le rôle des femmes dans ce soulèvement populaire aura surpris autant les hommes des milieux urbains que les ruraux.

Les agriculteurs protestent aux frontières de Singhu, Tikri et Ghazipur. Dans le district de Palwal aussi, les agriculteurs ont organisé une dharna[4]. Ils protestent contre : (1) la loi de 2020 portant sur l’accord pour les prix garantis et les services aux agriculteurs (autonomisation et protection), (2) la Loi de 2020 sur le commerce et le commerce des produits agricoles (promotion et facilitation) et, (3) la Essential Commodities (Amendment) Act, 2020, la loi sur les produits essentiels.

Le maintien du mandi

Ces lois, saluées par le gouvernement comme des réformes « historiques » et nécessaires depuis longtemps, ouvrent le secteur agricole aux acteurs privés. Toutefois, les agriculteurs craignent que la législation ne démantèle le système mandi qui a jusqu’ici assuré le prix minimum de soutien pour les produits agricoles. Ainsi, ces agriculteurs, de tous les groupes d’âge, se sont rassemblés sur l’autoroute à six voies avec leurs voitures, camions et tracteurs. « Le froid glacial n’a pas affecté notre mouvement, encore moins la chaleur mortelle », a déclaré Raja Singh, un agriculteur du Pendjab de 58 ans, cité par l’agence de presse Reuters.

Le mandi a été un grand cri de ralliement pour les manifestations, et celles du Pendjab, en particulier. Par la manière dont elle s’est développée au cours du dernier demi-siècle dans cet État, son importance pour la vie agricole, ne peut être sous-estimée. Sous le système mandi, les agriculteurs apportent du paddy et du blé au dépôt d’un « arhtia »[5], dans le cadre réglementé du Comité de commercialisation des produits agricoles (APMC), ou mandi. Toute quantité de ces cultures, évaluée selon certaines normes de qualité, est achetée par le gouvernement, par l’intermédiaire de la Food Corporation of India et d’autres organismes publics d’approvisionnement, au prix minimum de soutien (MSP), aussi connu en Inde sous le nom de « open procurement ».

Alors que Delhi se prépare à une nouvelle édition de ses étés torrides et que la saison des récoltes commence, les agriculteurs réunis samedi ont affirmé qu’ils n’avaient pas l’intention de faire demi-tour tant que leurs demandes n’auraient pas été satisfaites.


[1] Les manifestants ont permis aux véhicules d’urgence de paser pendant ces cinq heures.

[2] L’autoroute Kundli-Manesar-Palwal (KMP), longue de 136 km, est aussi souvent présentée sous le nom d’« autoroute périphérique ouest ». La section Manesar-Palwal de 53 km a été inaugurée par le ministre de l’Union Nitin Gadkari en 2016 et la section Kundli-Manesar de 83 km a été inaugurée par le Premier ministre Narendra Modi en 2018.

[3] Il y aurait eu onze sessions de discussions à ce stade.

[4] Le Dharna serait l’équivalent d’un sit-in. Dans l’arsenal des pacifistes hindous, il s’agit d’un veritable siege qui peut s’accompagner d’une grève de la faim allant jusqu’à la mort. C’est alors l’arme ultime des pauvres qui anéantissent à jamais le prestige du puissant.

[5] un agent commissionnaire.


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