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Aeroflot annonce des vols réguliers vers Maurice à partir du 23 décembre 2023. Les vols, au départ de Sheremetyevo (Moscou), seront assurés par de gros porteurs Boeing 777-300ER, les mercredis et les samedis. Les billets sont déjà disponibles sur le marché russe.
Dans un communiqué en date du 12 septembre, le transporteur russe annonce des vols bihebdomadaires « pour la première fois de son histoire récente ». En effet, le service aérien russe vers Maurice avait déjà été ouvert au milieu des années 90 à l’aide d’avions Il-62M (Ilyushin) et Tu154 (Tupolev).
Les codes et les horaires seront les suivants :
SU246 SVO2050 – 0900+1MRU 77W 36
SU247 MRU1100 – 2140SVO 77W 47
Le communiqué exagère un peu, toutefois, en affirmant qu’à cette époque, « Aeroflot était le premier et le seul transporteur aérien étranger à bénéficier de l’autorisation du gouvernement de l’île pour opérer des vols réguliers vers Maurice ». Ce qui serait plus exact, c’est que le transporteur russe mettait en œuvre son accord de cinquième liberté avec Maurice, ce qui lui permettait d’opérer une liaison hebdomadaire Moscow (Sheremetyevo) – Dubai – Mahé (Seychelles) – Maurice. Ce qui rendait effectivement unique l’accord bilatéral entre Moscou et Port-Louis.
Aeroflot assure cependant une belle promotion de la destination auprès de sa clientèle russe en proposant notamment les caractéristiques de l’exotisme îlien : « Aujourd’hui, les touristes russes visitant Maurice disposent d’une vaste infrastructure hôtelière et de magnifiques plages avec des récifs coralliens baignés par les eaux de l’océan Indien. La nature locale est célèbre pour sa flore et sa faune uniques, et grâce au climat tropical doux, les touristes peuvent s’y détendre toute l’année. La haute saison à Maurice dure de novembre à mai ».
Contourner les sanctions américaines et européennes
On peut se demander comment Aeroflot parvient à s’engager dans ce type d’opérations alors que la Russie fait l’objet de nombreuses sanctions initiées par les Etats-Unis et mises en oeuvre par l’Union Européenne qui essaie de faire pression sur ses partenaires hors-UE ? Le transporteur national russe utilise le 777-300ER dans ce but précis.
Plus tôt en ce mois de septembre, Aeroflot a conclu un accord d’assurance avec AerCap qui tient compte des avions qui avaient été séquestrés, et volés finalement, alors que les sanctions commençaient à frapper la Russie en raison de la guerre en Ukraine. Le transporteur russe a déclaré la semaine dernière qu’il continuerait à rechercher de tels accords afin de pouvoir inscrire davantage d’avions sur le registre national, ce qui signifie que ses avions ne seraient pas saisis en raison des sanctions.
« Dans le cadre du processus de règlement de l’assurance, nous obtenons des conditions nettement meilleures que celles que nous avions. Pour nous, c’est une démarche efficace », explique Sergei Aleksandrovsky, le PDG d’Aeroflot. « Nous avons jusqu’à présent conclu un accord concernant 18 avions et cinq moteurs avec AerCap. Nous menons actuellement des négociations sur 17 autres avions et d’ici la fin de l’année, nous prévoyons d’achever le processus sur 61 avions », ajoute-t-il.
Avec ces nouvelles conditions, les avions appartenant aux bailleurs occidentaux seront placés sous le contrôle de la compagnie d’assurance NSK, ce qui permettra une propriété russe. Cela signifie également que l’avion pourra être réimmatriculé de l’immatriculation bermudanaise de VQ à l’immatriculation russe de RA.
Commentant ces règlements concernant les avions étrangers et les réclamations d’assurance, Sergei Aleksandrovsky, : « Dans le cadre de la nouvelle réglementation, 300 milliards de roubles seront alloués à toutes les compagnies aériennes [russes], mais à la condition que les compagnies aériennes utilisent également leurs bénéfices nets pour le règlement ». Ainsi, la compagnie aérienne Pobeda a réalisé un bénéfice net de 15 milliards de roubles [en 2022], qui sera entièrement consacré au règlement des assurances des avions du groupe.
L’agilité d’une compagnie centenaire
Au-delà de la démarche tactique au plan de l’assurance de ses avions, la vision stratégique du groupe Aeroflot consiste à acquérir 339 avions de ligne fabriqués localement en Russie. Ainsi, Aeroflot contribue concrètement au soutien de la construction aéronautique russe en tant que client de lancement et plus gros acheteur d’avions de ligne gros porteurs passagers produits dans le pays. Cette orientation est un appui considérable à l’économie russe qui parvient à résister au blocus économique impulsé par les Etats-Unis et suivi par les Etats européens.
Le groupe Aeroflot, l’une des marques russes les plus connues, est la plus grande compagnie aérienne de Russie. Créée il y a 100 ans, il s’agit de l’une des plus anciennes compagnies aériennes au monde. Le leader de l’aviation commerciale russe, qui comprend également Rossiya Airlines et Pobeda Airlines, a transporté 20,5 millions de passagers en 2022, (40,7 millions de passagers pour le groupe Aeroflot, filiales comprises).
Aeroflot et les compagnies aériennes de ce groupe fournissent une connectivité aérienne aux villes et régions russes, ce qui est un atout pour ceux qui veulent découvrir la Russie. Le groupe aérien met en œuvre son propre programme de tarifs forfaitaires sur les vols vers les villes de l’Extrême-Orient russe et Kaliningrad. En développant constamment son réseau de routes intérieures russes, Aeroflot parvient à assurer des projets d’importance sociale, notamment fournir des emplois aux citoyens et développer professionnellement ses employés. Ces objectifs sociaux et économiques clés permettent à la compagnie de respecter ses engagements de développement durable.
Chez les observateurs du tourisme et de l’aérien commercial, tous les regards sont tournés vers le transporteur national russe pour voir s’il parvient à mettre l’ensemble de ses avions sous contrôle russe. Pour le moment, cela semble fonctionner, notamment avec les vols internationaux annoncés ces dernières semaines.