Vers des sanctions mauriciennes contre les Russes

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Les “Russian Busters” du secteur des affaires à Maurice?

Des experts du bureau de l’implémentation des sanctions du ministère anglais des Finances étaient en mission à Maurice la semaine dernière en vue de former leurs « partenaires » du gouvernement mauricien pour la mise en œuvre de ces sanctions. Interrogé récemment par Le Dimanche/L’Hebdo, le ministre mauricien des Affaires étrangères, Alan Ganoo, affirmait : « Nous sommes constants dans nos actions. C’est la troisième fois que nous votons en faveur d’une résolution contre la Russie ». Pour rappel, la Russie a toujours apporté un soutien constant aux revendications de souveraineté de Maurice sur les Chagos en votant et en s’assurant que ses alliés votent en faveur de l’Etat mauricien contre la Grande Bretagne.

Même si le ministre mauricien des Affaires Etrangères ne s’est pas exprimé sur le sujet, Charlotte Pierre, la représentante de la Haute Commission britannique, n’en fait pas secret. Elle l’annoncait d’ailleurs très ouvertement sur son compte LinkedIn : « This week we welcomed UK Treasury experts from the Office of Financial Sanctions Implementation to deliver training to MU government partners on sanction implementation ».

« They also engaged with business, including the British Business Group », nous apprend-elle, ajoutant que « The UK remains committed to work in partnership as we tackle global crises together ». Et, photos à l’appui, on a pu se rendre compte de la rencontre entre Jennifer Bairner, la représentante du Trésor de la Couronne britannique et Deeptee K.Bungaree-Gooheeram, chargée de la promotion du commerce britannique à Maurice avec Harvesh Seegolam, le directeur de la Banque de Maurice, Bonnie Qiu (HSBC – présidente de la Mauritius Bankers Association), Mathieu Mandeng (Standard Chartered Bank), Phil Hadley (TAM Asset Management), John Félicité (Ocorian) et Tim Taylor, le patron de Scott qui porte de nombreuses casquettes dans le monde des affaires à Maurice.

Maurice adopte la propagande des Occidentaux

Lors de l’assemblée générale des Nations unies le 2 mars dernier, 141 pays, dont Maurice, avaient condamné l’invasion de l’Ukraine par la Russie. Maurice fait partie des 93 pays qui ont voté en faveur de la suspension de la Russie de son siège au Conseil des droits de l’homme des Nations unies, le jeudi 7 avril. Vingt-quatre autres États ont voté contre et 58 se sont abstenus. Lors du vote du 7 avril, l’Inde s’est à nouveau abstenue, alors que la Chine a voté contre la suspension de la Russie du Conseil des droits de l’homme des Nations unies.

Expliquant à notre confrère Patrick Hilbert que la position du gouvernement mauricien procède d’un choix assumé, le ministre Ganoo ajoutait : « Nous avons toujours adhéré aux principes du droit international, de la charte des Nations unies, du respect de la souveraineté et de l’intégrité territoriale ». Et ce seraient « ces principes de base qui nous ont, une fois de plus, motivés à voter contre la Russie. Les pays qui ont cosigné cette résolution, dont la Grande-Bretagne, les États-Unis et beaucoup d’autres, l’ont fait à cause des atrocités qui se sont produites dernièrement à Boutcha, où il y a eu beaucoup d’injustice et de non-respect des droits humains ».

Les pays au sein de l’Union européenne avancent que la Russie aurait commis une série de crimes de guerre entre le 27 février et le 31 mars dernier à Boutcha, évoquant entre autres, le massacre de civils, des exécutions sommaires, de viols et des actes de torture. Il faut faire ressortir que rien ne permet d’établir à ce jour que les soldats russes auraient effectivement commis les exactions dont les Occidentaux les accusent. C’est ainsi que l’on peut comprendre pourquoi les représentants du Sénégal et du Brésil, qui se sont abstenus lors du vote, ont précisé qu’il importait d’attendre les conclusions de la Commission d’enquête indépendante sur l’Ukraine établie au début mars par le CDH.

Allan Ganoo, le ministre des Affaires Etrangères, en l’absence de toute preuve et avant même les conclusions de l’enquête de la commission indépendante, vote avec les Occidentaux pour sanctionner la Russie.
Pour les sanctions, c’est le ministre Mahen Seeruttun qui assume et avec Harvesh Seegoolam pour piloter les opérations

Discrimination par la nationalité

Les sanctions appliquées par les Etats européens à la demande des Etats-Unis consistent, non seulement à bloquer les comptes de l’Etat russe, mais aussi à geler les comptes des ressortissants russes. Ce qui est à la fois surprenant et choquant, c’est de constater que le suivisme des Européens leur fait adopter des méthodes discriminatoires identiques à celles pratiquées par les Nazis à l’égard des Juifs avant et durant la Deuxième guerre. Dans le cas présent, ce sont des Russes totalement innocents qui sont ciblés et qui n’ont plus accès à leurs revenus dans les pays où ils se trouvent et exercent des métiers tout à fait légitimes et en toute légalité. Beaucoup se retrouvent ainsi dans des conditions précaires en Europe et les Occidentaux semblent déterminés à poursuivre cette traque au plan global.

En France, par exemple, la Société Générale, BNP Paribas ou encore Crédit Mutuel/CIC sont particulièrement pointés du doigt. Selon la revue Capital, une pétition sur le site change.org, lancée lundi 28 mars, a dépassé les 2 000 signatures. Pour le président de l’association de défense des usagers bancaires France Conso Banque, Michel Guillaud, interrogé par Le Figaro, cette pratique est « abusive » et « arbitraire ».

« Les banques font preuve d’un zèle qui n’est absolument pas demandé par les textes européens », tempêtait Me Alexandre Meyniel sur France Info. Avocat au barreau de Paris et de New-York, spécialisé dans l’arbitrage et le contentieux des affaires, il a été contacté avec son associée du cabinet Cartier Meyniel Schneller, Me Marie-Laure Cartier, par des ressortissants russes pour les assister dans leurs démarches et les représenter dans le cadre d’un contentieux.

A Maurice où, toutes les activités bancaires sont désormais techniquement conformes aux desiderata de l’UE, le ministre des Services financiers continue de promouvoir Maurice comme destination d’investissement avec des programmes de résidence fiscale. Sans l’application effective des garanties usuelles, cette promotion relèverait-elle de pratiques visant à tromper la bonne foi des clients? L’inviolabilité des contrats est et demeure un principe cardinal du droit international public. Par ailleurs, il faut savoir que sur le sol mauricien, le ressortissant étranger bénéficie des mêmes droits que les locaux, leur garantissant les libertés individuelles et la protection constitutionnelle qui y est associée. Il s’avère néanmoins que la police de l’immigration s’est permis récemment de mépriser un ordre de la Cour suprême pour déporter un ressortissant étranger à qui, en outre, un certificat de moralité validé avait été remis.


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