Covid-19 et Quarantaine: Mobilisation syndicale pour contrer l’adoption des projets de loi

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Les responsables syndicaux estiment que le mécontentement populaire pourrait déboucher sur des révoltes et des soulèvements.

Les membres de Konversation Kolektif Solider après leur rencontre avec le Premier ministre hier soir

Le Premier ministre et trois autres de ses collègues du Cabinet ont consenti à rencontrer ce soir des membres du Konversation Kolektif Solider (KKS), un collectif de syndicalistes et d’activistes écologiques, qui invitent à la mobilisation citoyenne en vue de contrer l’adoption des projets de loi Covid-19 Bill et Quarantine Bill, présentés en première lecture au parlement aujourd’hui. De nombreuses dispositions sont considérées d’une part, attentatoires aux droits des employés, et d’autre part, accordant aux employeurs toutes les latitudes pour la révision des contrats de travail. Lors d’une visioconférence avec la presse hier, les responsables du KKS ont fait part des angoisses populaires liées à la reprise des activités dans des conditions sanitaires incertaines et aussi à la colère d’une population s’estimant trahie et rendue vulnérable en raison des facilités accordés aux employeurs d’imposer des conditions de travail contraignantes et de licencier.

Selon Jane Ragoo, de la Confédération des Travailleurs du Secteur Privé (CTSP), qui s’adressait à la presse à l’issue de la réunion avec le Premier ministre, Pravind Jugnauth les a écoutés durant une demie heure mais n’a montré aucune disposition à retoucher ses projets de loi. « Li byin tris pou dir zot ki linn byin ékout nou mé malérezman li pa pou sanz so lidé. Li dir pou lintéré péyi, sékimm met lor papyé pou sa Covid-là, sé sa ki pou al de lavan. Li pou asim so responsabilité. Linn fer appel nou konpréansyon, nounn fer li konpran tou sa dimounn ki ankolèr déor, napa tous nou lalwa travay », a-t-elle expliqué.

La veille, lors de leur visioconférence, les membres du collectif KKS ont fait ressortir que sous le Covid-19 Bill, le gouvernement risque de mettre le pays en faillite avec ses subventions puisées des réserves de l’État et accordées sans discernement au secteur privé. Ainsi, Ashok Subron ainsi que Clency Bibi faisaient ressortir que la section 72 (a) du projet de loi s’oppose à la section 67 du Workers Rights Act. Pour Jane Ragoo, ces dispositions étaient déjà à l’agenda du patronat avant même la crise sanitaire du Covid-19 et que le lobby patronal a profité des deux mois de confinement pour passer à l’action par le biais de Business Mauritius.

Pour le KKS, le projet de loi Covid-19 ne pose pas de cadre régulateur pour le travail à domicile. Jane Ragoo donne des exemples : « Lalwa lor Work from Home koma protez travayèr ? Ki mo local ? Ki mo tan répo ? Ki manyèr mo fèr si mo éna zanfan ? ». Pour eux, le Covid-19 Bill, ne prescrit rien pour ce qui est des modalités de transport pour les travailleurs. Rien non plus pour le secteur informel, ni pour les travailleurs étrangers dont certains n’ont pas été payés et ont des difficultés à se nourrir. Des enseignants se retrouvent à utiliser leurs ordinateurs personnels comme outils de travail et, à défaut de le faire, peuvent avoir à faire face à des actions disciplinaires.

Naraindranath Gopee, les recours du gouvernement à Rs. 18 milliards des fonds de la Banque de Maurice pour subventionner des compagnies relèvent de « l’extorsion ». En outre, il s’insurge contre le fait que le gouvernement entend cette fois recourir aux réserves en devises étrangères, toujours sans rendre de comptes quant aux modalités et l’usage de ces fonds. Les précédents gouvernements, dit-il, ont accordé des terres et des plages, et celui-ci est à « fèr dimounn mizèr vinn pli mizèr. Pé rass bousé manzé bann travayer ».

A une question d’Indocile sur la validité des conditions sanitaires sur les lieux de travail et les assurances pour que les employés ne contaminent pas leurs familles, plus précisément si les autorités garantissent une conformité aux conditions prescrites dans le cadre de la législation Occupational Safety and Health, Jane Ragoo s’est dit préoccupée par le fait que l’État n’a pas prescrit de normes auxquelles les entreprises devraient souscrire. Il en résulte des initiatives prises par les entreprises elles-mêmes, ce qui pousse Ashok Subron à dire que les mesures sanitaires sur les lieux de travail ont été « privatisées ». Rashid Emrith, resposable de la Government General Services Union (GGSU), révèle pour sa part que la reprise dans le service civil n’a pas été préparée au plan sanitaire. « Pa finn prépar la rantré ; sakenn pé fèr dan so fason ». Il affirme qu’il n’y a pas eu d’évaluation des risques dans le secteur public comme dans le secteur privé.

Les intervenants du KKS estiment que le gouvernement fait montre de mépris envers les travailleurs, alors que des fonds de soutien sont accordés à des compagnies disposant de réserves et qui ont les moyens de verser des dividendes à leurs actionnaires. Pour Ashok Subron, c’était le moment d’instaurer un impôt sur la fortune. « Mé bann gran patron palé tous naryin saki pou zot, mé met lalwa lor travayèr. Bann minis palé tous naryin saki pou zot, mé zot pran rézerv ».

Pour les dirigeants du mouvement syndical réunis au sein de ce collectif, le gouvernement devrait tenir compte du mécontentement populaire qui est tout à fait réel. Ce qui pourrait, selon eux, occasionner des soulèvements et des révoltes, « pa koné kot sa kapav alé ».


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