L’État d’urgence : Bas les masques ?

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L’adage selon lequel « la fonction fait l’homme » est une de ces énoncées qui ne se reporte pas à la règle mais à l’exception. Pour preuve, elle fait référence aux qualités exceptionnels que quelqu’un démontre dans l’exercice d’une fonction, alors qu’en règle générale, ces qualités n’étaient pas apparentes ou peu connues. C’est le cas du Dr. Zubeyr Joomye, que l’on ne peut présenter comme un de ces leaders politiques charismatiques, mais qui justement, en raison du fait qu’il n’a jamais brillé dans ce registre, révèle des qualités exceptionnelles dans son rôle de porte-parole principal du comité national de gestion des opérations de la crise sanitaire du COVID-19.

De par nos fonctions antérieures, et pour avoir contribué à la formation de quelques responsables du secteur privé à ce type de prise de parole, nous pouvons dire, comme il nous plaît de le reconnaître, que le pays, et le gouvernement en particulier, dispose d’une compétence providentielle en ce médecin qui a su très vite s’élever aux impératifs du moment. C’est là un rôle très difficile, surtout face à des gens de presse dont les prestations inégales révèlent le mentoring médiocre de leurs rédactions. C’est là un rôle rendu plus difficile par ses collègues ministres qui se sont disqualifiés, minés qu’ils sont par les parasites de la partisanerie politique et les travers égocentriques que pareille infection génère chez les sujets atteints.

Aussi, il faut impérativement préserver le soldat Joomye qui, sorti des tranchées, effectue sa part efficacement. Mais il faudrait aussi s’assurer que ces éléments parasitaires qui ont épuisé la crédibilité dont on leur faisait crédit, soient invités à se mettre à l’écart. S’il leur manque encore les facultés et le tant soit peu d’honneur qui leur commande de le faire d’eux-mêmes… Soyons précis dans nos propos : il ne s’agit pas pour ceux-là de démissionner. Ce serait prématuré. Il s’agit, en cet état d’urgence, de les enlever de la première ligne et ainsi s’assurer que la crétinerie ne tire dans le dos du soldat Joomye ! Elle en est capable. Et ne cesse de démontrer ses aptitudes aux approximations (Qui a compris les dispositions du couvre-feu annoncé par le « Premier sinistre » ferait acte de charité en éclairant les vieilles personnes qui peinent à avancer jusqu’à la boutique du coin pour acheter leur pain et qui s’inquiètent de l’épuisement de leurs médicaments pour la tension et le diabète).

Le danger pour le soldat Joomye de s’écrouler sous les feux amis est réel. Pour en parler, votre serviteur va essayer de tenir compte des critiques de ses lecteurs qui le trouvent quelquefois trop grave, trop sévère, trop austère, etc. Le rire m’ayant été recommandé pour ses vertus pédagogiques, je vais essayer de m’employer à ce genre que je ne suis pas sûr de bien maîtriser. Ainsi, nous avons tous dans nos familles ce boute-en-train qui saura prendre sa guitare et mettre un peu d’ambiance dans les réunions de famille. Et, nous avons presque tous au sein de nos familles, ce type intelligent, qui connaît par cœur les paroles des chansons et qui va forcer un peu les articulations et les accents pour impressionner la galerie. Mais nos familles ne sont pas toujours bien dotés car, dans bien des cas, celui qui aime tellement chanter au point d’apprendre les paroles par cœur, est celui qui chante faux ! Ou alors, c’est celui qui, incapable d’entendre la mesure, démarre à contretemps ! C’est la description la plus sympathique, sinon la plus charitable, qu’il m’est possible de faire du ministre des Finances. A-t-il pris des mesures pour que le pays puise de ses réserves pour faire face à la crise ? Ou s’agit-il des mesures pour doper une relance post-crise ? Non, monsieur le ministre, même si vous débarquez avec votre collègue Nando et une troupe rodriguaise à Saint-Tropez, la quadrille et une scottish n’ont pas la même cadence ! Même avec les trois bouteilles de whisky ? Si vous tenez tant à ressembler au cabri danseur-de-polka !

« La culture du déni : prédisposition des politiques ou contamination populaire ? » Ce serait là peut-être un sujet d’étude plus conforme au champ de compétences du psychiatre Jagutpal. Maintenant qu’il fait partie du personnel politique, il lui manquerait sans doute de la distance ; mais s’il parvient à en prendre pour au moins méditer sur le sujet, peut-être qu’il finirait par s’éloigner de ceux qui aiment à être perçus en responsables politiques… quand bien même la notion de responsabilité leur serait étrangère !

Nos connaissances en psychologie sont trop lacunaires pour que nous puissions nous prononcer de manière formelle ; mais, les réactions de Pravind Jugnauth dès que Navin Ramgoolam se manifeste s’apparentent à un TOC. Le trouble obsessionnel compulsif se manifeste par ce besoin irrépressible de démontrer qu’il serait meilleur que cet adversaire qui n’a plus pourtant de rôle institutionnel dont il devrait s’embarrasser en sa qualité de Premier ministre. Comble de malchance, le jouvenceau proche de la soixantaine ne dispose pas, dans sa cour pourtant abondante, un de ces fous disposés à lui mettre les yeux en face des trous. Son entourage est fait d’agents pavloviens, des gens qui par réflexes conditionnés l’engagent dans une campagne propagandiste dès qu’il est contrarié.

Si l’excès en tout nuit, nous sommes aujourd’hui tenus de constater que l’excès de partisanerie nuit gravement à la politique. Sous le ciel plus clément de ce temps d’épidémie, la cavalerie des propagandistes a emmené son acteur principal au centre de refuge de Quatre-Soeurs. Pour le tournage de « Pravind pisse sur le virus », le producteur Jagutpal a voulu montrer un Premier ministre poussant la témérité jusqu’à l’inconscience. Aucun équipement de protection pour aller faire la causette à ceux mis en quarantaine parce que ce sont des cas suspects !

Depuis soixante ans, notre personnel politique a favorisé, par l’inaction et les omissions, les conditions qui permettent au coronavirus d’engager aujourd’hui une véritable guérilla urbaine.

Pour peu que la bêtise les motivant ait pu leur paraître sympathique, les Mauriciens sont capables de s’ébaubir des décisions de leurs dirigeants aussi douteuses qu’elles eussent pu être. En un peu plus d’un mois toutefois, on a assisté à la régression de cette propension et, depuis l’annonce des premiers cas de coronavirus, tout un peuple de sentimentalo-couillons voit, au-delà de la cataracte partisane, l’avancée inexorable de l’ennemi déjà bien engouffré dans nos villes.

Sans le voile de l’illusion, le réalisme de la vision populaire se décuple. Se révèle ainsi le tableau saisissant de la mise à nu du personnel politique : il sont démunis des attributs dont leurs propagandistes nous vantaient. Ainsi, la file des impuissants chez ceux que l’on croyait omnipotents n’a eu de cesse de s’allonger depuis trois jours. Aux machistes émasculés, viendront s’ajouter les disparus que des mémoires sectaires et partisans ont voulu déifier et placer au panthéon des idoles à vénérer. Car depuis 60 ans – oui, six décennies ! – notre personnel politique a favorisé, par l’inaction et les omissions, les conditions qui permettent au coronavirus d’engager aujourd’hui une véritable guérilla urbaine. Dans les différents articles de notre dossier, on peut se rendre compte que le virus est extrêmement menaçant pour nos concitoyens les plus pauvres.

En se réveillant chaque matin depuis l’annonce des premiers cas de personnes atteintes du COVID-19, de plus en plus de Mauriciens réalisent que la légitimité issu des urnes ne produit pas automatiquement un réservoir de compétences aptes à protéger une population des calamités. Nous sommes désormais en guerre. Il s’agit d’une guerre paradoxale : pour vaincre le COVID-19, les Mauriciens doivent mener bataille contre eux-mêmes pour sortir de l’emprise de ceux qui ont jusqu’ici entretenu et exploité leurs faiblesses et leurs bas-instincts !

Après l’annonce officielle des trois premiers cas répertoriés à Maurice par le Premier ministre lui-même, ce dernier aura peut-être à expliquer le bien-fondé de son jugement quand il considérait qu’il ne pouvait pas interdire aux étudiants Mauriciens de rentrer. En ce qui nous concerne, nous n’avions pas manqué de faire part, dès le soir de son annonce le 16 mars, que cela devait « faire sourciller ceux qui étaient persuadés qu’il existait en droit la notion de « force majeure » ! ». Faut-il s’étonner qu’à partir de là le légiste Bodha n’ait pas su, avec ou sans diplomatie, apposer une fin de non-recevoir au légiste Narsinghen en l’invitant à profiter de la période de confinement pour disserter sur les conditions particulières de l’état d’urgence.

Le travail du journaliste paraît compliqué dans cette circonstance particulière. Il l’est d’autant plus quand l’ensemble des confrères a opté pour une simplification se résumant à l’amplification de la parole institutionnelle et la préférence de la phénoménologie au détriment de toute méthodologie. Mais l’exemple du Dr. Caussy devrait inspirer autant les soignants que ceux qui, à divers degrés et en leurs qualités respectives, doivent appliquer leurs savoirs au service de leurs concitoyens.

Pour nous, il importe de simplement continuer à situer les enjeux de cette crise sanitaire et d’en faire part pour l’édification du plus grand nombre. En rendant compte de nos approches méthodologiques, nous ne pouvons qu’espérer que cela contribue au bon sens qui fait défaut dans les rangs du gouvernement et ceux de nos confrères qui doivent couvrir l’actualité qu’ils créent et suscitent. Dans quelle mesure notre population parviendra-t-elle à contraindre leurs élus à abandonner leurs réflexes partisans pour faire face aux conséquences de leurs manquements politiques ? Comme il y va de leur survie cette fois, peut-être y parviendront-ils… s’ils consentaient eux-mêmes à se purger du gavage de la partisanerie.

Joël TOUSSAINT

PS 1: La notion d’état d’urgence n’est plus connu des Mauriciens et même certains de nos gouvernants ne semblent pas mesurer toutes ses implications. L’état d’urgence sanitaire, comme tout type d’état d’urgence, engage des dispositions légales qui peuvent limiter les dispositions constitutionnelles qui régissent des libertés individuelles. Le fonctionnement démocratique n’est plus assuré de la même manière et permet d’instaurer le couvre-feu pour limiter la circulation. Nous attirons l’attention de nos lecteurs que les mots ne sont pas anodins. Le terme couvre-feu renvoie à une disposition spécifique permettant aux forces de l’ordre de faire feu selon des procédures qui leur sont propres. Le DCP Jhugroo a jusqu’ici indiqué que la police exerce encore une forme de discrétion dans l’évaluation des raisons de la mobilité des personnes. Les incartades peuvent susciter une hausse des mesures policières jusqu’à l’usage des armes.

PS2 : Compte tenu de mes compétences, je tiens par ces présentes à informer que je me mets à disposition dans le cas éventuel où ces compétences seraient requises à des fins opérationnels, plus particulièrement dans la formulation des mesures à portée sociétale, l’organisation des confinements selon des modalités géographiques, démographiques et sociologiques.


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Un commentaire sur « L’État d’urgence : Bas les masques ? »

  1. l’organisation des confinements selon les différentes modalités est quai nulle, mais aurait été un MUST! fort dommage que nous ayons les compétences requises et qu’on en épuise pas!

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