Prison – Le refus de manger est un message adressé au gouvernement

Vous avez aimé cet article, vous pouvez le partager. Merci d'en faire profiter à d'autres.

Temps de lecture : 3 minutes

 – Parole d’officier : « Il faut que le gouvernement réalise que tout se passe dans la discipline et que personne ne veut la confrontation »

En refusant leur repas hier, les détenus de la prison ont voulu adresser un message au gouvernement : pour eux, la parole du commissaire des prisons n’est pas fiable ! C’est l’information transmise à Indocile hier soir. Malgré les possibilités réduites de vérification, des sources concordantes nous confirment cette version. Notre exercice de vérification nous montre que ce message serait aussi celui de certains officiers !

« Non, ce n’est pas une mutinerie à proprement parler. La situation est critique cependant, parce que ce n’est pas sain quand les détenus savent qu’il y a des officiers eux-mêmes qui ne sont pas à l’aise avec les mesures prises par le commissaire » : les propos de l’officier qui communique avec nous sont très cohérents malgré la pression du moment.
Selon cette source, ce n’est pas une mutinerie parce que les détenus observent une discipline exemplaire : « Ils respectent les officiers et nous n’avons pas de problème avec eux ». Les sources convergent pour nous dire que le gouvernement a le devoir d’agir rapidement « avant que la situation n’échappe à tout contrôle ». « Il faut que le gouvernement réalise que tout se passe dans la discipline et que personne ne veut la confrontation », ajoute notre source.
La tension est palpable depuis un certain temps déjà, nous disent d’autres officiers, les prisonniers avaient déjà évoqué une possible grève de la faim. Mais les choses auraient pris une autre tournure à partir de lundi. Une de nos sources explique que les propos du commissaire qui se montrait rassurant dans L’Express ne correspondent pas à la réalité. «Les détenus ainsi que les gardiens de prison ont accepté cette nouvelle mesure. Tout se passe bien», citait notre consœur Manisha Deena, qui ajoutait : «Les cigarettes sont interdites dans ces centres et tout se passe bien. Cette mesure permettra aux proches des détenus d’économiser de l’agent». Notre propre enquête nous faisait déjà sourciller sur cette version voulant faire accroire à une économie qui serait réalisée par les proches des détenus. Ce serait, en reealité, une extrapolation d’une situation propre aux détenus en attente de jugement (ndlr : « unconvicted detainees », ceux dont on dit qu’ils sont « on remand »). Nous y reviendrons.
Pour le moment, les faits survenus hier démontrent certainement que les choses ne se passent pas aussi bien que le commissaire le prétend. En refusant leur repas hier après-midi, les détenus de la prison des hommes à Beau-Bassin ont souhaité adresser un message au gouvernement, nous disent nos sources. Ce que le commissaire raconte à la presse et ailleurs ne correspond pas à la réalité, selon eux.

Malaise chez les officiers

Cet avis ne serait pas seulement ceux des détenus. En interrogeant nos sources, nous nous apercevons rapidement que eux aussi sont mécontents de cette version parue dans L’Express. « Dire que les détenus et les gardiens ont accepté la mesure est une conclusion hâtive. Ce n’est pas parce que personne ne veut s’exprimer et dire au commissaire qu’il est dans l’erreur que cela veut dire que les officiers sont d’accord. Ce n’est pas la même chose. Nous faisons notre travail, même si les ordres sont mauvais, nous sommes couverts par les Standing Orders. Chacun doit assumer ses responsabilités », nous dit notre principale source.
Nos sources indiquent que l’article d’Indocile de dimanche dernier a produit un onde de choc parmi les officiers. Il n’y a pas de mouvement concerté de leur côté, mais ils réalisent qu’il y a des collègues parmi eux qui nous orientent vers des éléments techniques. Il y aurait parmi eux un sentiment général qu’il faut prévenir tout débordement et qu’il est urgent que le gouvernement intervienne. Nos sources, prises séparément, estiment que, du point de vue des détenus, le commissaire s’est disqualifié de ses fonctions. Et de par leurs propos, nous comprenons que les officiers seraient aussi nombreux à partager cet avis.
« Les journalistes seraient bien étonnés à quel point les détenus connaissent la loi. Ils en discutent entre eux et embarrassent parfois leurs avocats. Ils connaissent les règlements de la prison et ils comptent leurs jours de détention avec parfois plus de précision que l’administration », nous dit un des officiers.
Aussi, pour les détenus, la privation de cigarettes n’est pas conforme à la législation en vigueur (ndlr : The Reform Institutions Act). Pour eux, la décision du commissaire n’est pas conforme à la loi. « Si li finn fané, li finn fané. Ki fer ou krwar nou andan nou ? » : un officier de la prison nous rapporte ainsi les propos d’un détenu.


Vous avez aimé cet article, vous pouvez le partager. Merci d'en faire profiter à d'autres.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *