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La question de la peine de mort est revenue sur le tapis dans la foulée de la mort cruelle d’une policière tuée dans un choc violent avec une voiture qui roulait à vive allure et conduite par un présumé trafiquant de drogue. Bien des gens appellent au rétablissement de la peine capitale, qui fut abolie dans les années 80 pour satisfaire une des conditions du retour du PMSD de SGD, un politicien libertaire, au gouvernement dirigé alors par SAJ.
Depuis que Pravind Jugnauth, le Premier ministre, s’est exprimé en faveur de la peine capitale contre les trafiquants de drogue jugés coupables après un procès en Cour, les partis d’opposition parlementaire (Ptr, MMM et PMSD) n’ont pas tardé à faire connaître leur position. Ils sont catégoriquement contre la peine capitale. Dès lors tout débat sur la peine de mort prend forcément une dimension politique. Il faut pourtant un débat dépassionné où la raison et les valeurs humaines l’emportent sur l’émotion.
Dans ce débat, il y a deux camps diamétralement opposés, l’un pour et l’autre contre. Entre les deux camps, il y a des personnes qui n’ont pas de position tranchée et s’interrogent toujours sur les bienfaits (valeur de « deterrent1 » au crime) et les méfaits (risques d’erreurs judiciaires qui mettent la guillotine sur des suspects innocents) de la peine capitale.
Dans le camp pour la peine capitale, il y a sans doute l’émotion populaire au sujet d’un crime horrible et crapuleux et un certain populisme de droite qui voudrait surfer sur une vague populaire au nom du « law and order ». Personne ne peut nier que la criminalité en tous genres a pris une courbe ascendante depuis longtemps. Aucun jour ne se passe sans que la presse ne rapporte un meurtre (avec ou sans préméditation), une disparition suspecte, un viol ou autre forme d’agression sexuelle, un accident de voiture homicide, un vol à main armée ou un vol avec effraction, un kidnapping d’enfant ou une scène de violence domestique. Les cas de féminicide et d’infanticide se multiplient.
Cette atmosphère d’insécurité généralisée est inquiétante avec les crimes violents et les séquelles du crime organisé (trafic de drogue). Quelle est la réponse des autorités face à cette situation incontrôlable selon toute apparence ? Faudrait-il une peine capitale sélective dans des cas d’infanticide délibéré et de viols suivis d’assassinats de mineurs ? Récemment, l’Inde a introduit la peine capitale pour les cas de viols organisés de jeunes filles.
Les défenseurs des droits de l’homme argueront que l’Etat n’a pas le droit de tuer une personne, volontairement ou involontairement. Pour eux, le droit à la vie est sacré et personne ne saurait l’enlever à quiconque sous quelque prétexte que ce soit. Au nom de cet humanisme, ils contestent toute proposition de rétablir la peine capitale, même dans le cas où un criminel récidiviste posant un danger à d’autres personnes est trouvé coupable de crime sans équivoque (beyond reasonable doubt). Ils invoquent la convention internationale contre la peine de mort, dont Maurice fait partie des pays signataires, pour justifier leurs propres normes morales.
A l’opposé de ces humanistes libertaires, il y a des gens non moins humanistes qui pensent que certains crimes horribles tels que le meurtre avec préméditation ou le viol d’un enfant mineur sont passibles de la peine capitale. Ils croient que certains criminels récidivistes sont incapables de réhabilitation sociale et doivent être éliminés à jamais afin d’épargner à l’Etat les frais de leur incarcération.
Sur l’échelle de la morale, les droits des criminels (la défense assurée, le procès équitable, la protection physique de la personne) ne sont pas plus importants que les droits des victimes. Ces derniers temps, il semble que le balancier de la justice a basculé du côté des criminels présumés en laissant les victimes à leur sort malheureux. Dans certains cas, les magistrats imposent des peines ridicules, à telle enseigne que le Directeur des poursuites publiques (DPP) doit parfois faire appel de ces décisions. Dans d’autres cas, certains criminels poursuivis et condamnés à des peines sévères ont la chance d’être graciés par la commission de pourvoi en grâce (nous l’espérons, pour des raisons défendables).
Un camp n’a pas de supériorité morale sur l’autre dans ce débat. Dans notre État de droit, il est essentiel de trouver un juste équilibre entre les droits des présumés criminels et les droits des victimes pour que la justice naturelle triomphe.
1Effet dissuasif