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Rachel Ng est une de ces femmes que la vie a bien doté autant qu’elle l’a rudement éprouvé. Elle n’était pas que fille de boutiquier, mais aussi celle d’un agriculteur, puisque son père, qui tenait la fameuse boutique Macoona à Plaine Magnien, avait investi dans un champ de cannes à Riche-en-Eau. Il y emmenait sa fille qui, toute petite, jetait un coup d’oeil sur les cantines, les fameux katoras des laboureurs et enlaçait les arbres.
Elle avait le sens des affaires depuis très jeune ; prenant, par exemple, un petit lot de friandises pour le revendre à ses amies du Couvent de Lorette de Curepipe où elle était scolarisée. Après ses études au Canada où elle étudie les Sciences politiques et les Relations internationales, elle rentre à Maurice pour exercer dans le domaine de la formation professionnelle. Spécialiste du développement des compétences transversales, elle sera l’initiatrice, avec Monica Maurel, des programmes d’alphabétisation fonctionnelle au sein de la Robert Antoine Sugar IndustryTraining Centre. Cette passionnée de l’autonomisation (Empowerment) des individus va ainsi intervenir dans plusieurs secteurs, des sucreries aux banques, ce qui lui procure la satisfaction de réaliser que ses compétences ont une réelle utilité sociale.
L’épreuve de la maladie démarre pour elle à partir de 2014. Diabétique depuis l’enfance, elle aura à subir une amputation au pied. Puis vient l’insuffisance rénale et les complications liées à la dialyse. « J’ai failli mourir en trois occasions. Le Near Death Experience, je connais. Mais mon créateur m’a laissé en vie. Je crois que j’ai une mission », dit-elle.
La période de confinement lui fait prendre conscience de l’atout dont elle dispose puisque c’est elle qui a hérité des terres. « On se serait attendu que mon père donne la terre à son fils, mais c’est à moi qu’il en a fait don. Il savait que j’étais dans mon élément, c’est peut-être pour cela », pense-t-elle. Puis survient le naufrage du Wakashio. Elle prend conscience du drame avec ses fibres de rotarienne, de villageoise, de professionnelle. Élevée dans la culture du crédit aux démunis comme aux mieux lotis, la fille de Macoona-le-boutiquier voit les bouches à nourrir alors que des parents sont sans revenus…
Rachele Ng a décidé de mettre ses terres à disposition. Pas n’importe comment. Les humains ont-ils autant de ressources pour tirer le meilleur de celles que procure la terre ? Rachel Ng s’est donné pour mission de conjuguer des compétences humaines, estimant que chacun pourrait, en fonction de ses connaissances et de ses expériences, trouver un usage aux divers éléments se trouvant sur son terrain. Elle perçoit son patrimoine foncier comme un espace de vie, un lieu où les personnes affectées peuvent se reconstruire pour peu qu’ils y mettent leur part de bonne volonté.
Déjà, il y a des personnes qui réagissent positivement à son projet. Un cordonnier qui lui explique que certains types de bois peuvent être façonnés en talons. Une autre personne lui explique les vertus médicinales de l’arbre dit « Sang-Dragon ». Là, elle comprend que ses terres accèdent à d’autres potentialités lorsqu’elle s’ouvre aux compétences multiples.
Rachele Ng a maintenant la confirmation de son intuition. Elle a donné le nom de ses parents à son projet : Mac-Daisy Espace de Vie. Ainsi, elle donne rendez-vous aux personnes de bonne volonté de sa région sur son terrain le 14 et 15 novembre. C’est ainsi qu’elle lance un appel à Mme. Ameenah Gurib-Fakim ; l’ex-présidente de la république, botaniste émérite, est aussi originaire du sud-est. Différents volontaires l’accompagnent dans son projet et elle aurait aimé que d’autres personnes compétentes s’y intéressent aussi afin de permettre à certains de surmonter les épreuves du quotidien post-Covid et post-Wakashio.