Maroc : Omar Radi, journaliste d’investigation, condamné pour espionnage et viol

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Le journaliste était sur la liste des journalistes ciblés par le logiciel espion Pegasus

Omar Radi, un journaliste et militant qui embarrasse le royaume du Maric

Un tribunal de Casablanca a condamné lundi le journaliste et militant marocain Omar Radi à six ans de prison après l’avoir déclaré coupable dans une double affaire d’« espionnage » et de « viol ». Son collègue, Imad Stitou, a été reconnu coupable de « participation à un viol » et condamné à 12 mois de prison, dont six mois fermes. Les groupes de défense des droits affirment que les accusations sont motivées par des raisons politiques.

Omar Radi était accusé d’« atteinte à la sécurité intérieure de l’État » et d’avoir reçu des « financements étrangers » en lien avec « des services de renseignement » mais aussi de « viol ». Depuis son arrestation en juillet 2020, le journaliste d’investigation a toujours nié tout acte répréhensible.

« Le parquet est motivé par la vengeance et non par la quête de la vérité », a clamé, sûr de lui, le reporter lors de sa dernière adresse devant le tribunal de Casablanca, en audience publique. Le journaliste est en détention provisoire depuis juillet 2020. Il a toujours affirmé être poursuivi en raison de ses opinions critiques du pouvoir. Il peut faire appel.

L’enquête pour « espionnage » avait été ouverte fin juin 2020, après la publication d’un rapport d’Amnesty International affirmant que le téléphone d’Omar Radi avait été piraté. Une affirmation contestée alors par le gouvernement marocain.

Cependant, il s’avère que Radi figure dans la liste des 189 journalistes du monde entier qui, selon Forbidden Stories, avaient été ciblés par les clients du groupe israélien NSO. Ce groupe de pirates informatiques vend le maliciel modulaire « Pegasus », un logiciel malveillant de qualité militaire utilisé par une dizaine d’Etats pour l’espionnage de journalistes, de militants des droits de l’homme et de dissidents politiques, comme l’a indiqué cette semaine un consortium mondial de médias se basant sur le travail conjoint d’Amnesty International et de Forbidden Stories.

De l’espionnage au viol

L’enquête pour « viol » avait été ouverte fin juillet 2020 sur plainte d’une collègue d’Omar Radi. Si le journaliste parle de « relations librement consenties », la plaignante affirme pour sa part qu’elle n’était pas consentante. Le tribunal de Casablanca a condamné Radi (35 ans) à verser 200 000 dhirams (l’équivalent de 22 300 dollars) à la victime de l’agression sexuelle présumée. Stitou (32 ans) devrait s’acquitter du tiers de ce montant.

Les accusations portées contre Radi ont été fortement critiquées par les groupes de défense des droits qui affirment qu’elles sont motivées par des raisons politiques. Beaucoup dénoncent une répression des médias d’information et un harcèlement des détracteurs du gouvernement. Dans un rapport publié en juin 2020, Amnesty International déclarait que les autorités marocaines avaient illégalement espionné le journaliste par le biais de son téléphone en utilisant un logiciel de surveillance sophistiqué.

Le gouvernement marocain avait alors mis au défi l’agence Amnesty international de fournir la preuve de ces allégations après que celle-ci l’ait accusé d’espionner des journalistes. Défi relevé avec l’aide de l’agence française « Forbidden Stories » qui révèlent que les services secrets marocains avaient une dizaine de milliers de personnes, dont Omar Radi, sur leur liste de personnes ciblées avec le maliciel Pegasus. Des journalistes Français ont requis, et obtenu, que les autorités françaises enquêtent sur ces intrusions malveillantes du gouvernement marocain dans leurs données personnelles protégées par les conventions internationales.

Plusieurs ONG internationales s’inquiètent des condamnations de journalistes en vertu du code pénal. En octobre 2019, la journaliste Hajar Raissouni avait été condamnée à un an de prison pour « avortement illégal et sexe hors mariage » avant d’être graciée par le roi dans la foulée. L’accusation à caractère sexuel n’est pas sans rappeler celle de Julian Assange, le fondateur de Wikileaks, également accusé de viol dans le but d’obtenir son extradition.  

Le Maroc occupe la 136e place sur les 180 pays au classement de Reporters Sans Frontières.


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